Le mot de l’éditeur ; » Printemps 1993. Joaquim, vingt ans, débarque au milieu de Sarajevo assiégée. Armé de son seul appareil photo, il cherche à échapper à son enfance et à se confronter à la mort. Cette mort que vient de choisir sa jeune soeur Viviane, fatiguée d’expier dans l’anorexie un tabou familial jamais levé. Eté 2017. Joaquim apprend le décès de son père. Le temps d’un Paris-Rouen, lui reviennent en rafales les souvenirs de sa famille bourgeoise, apparemment sans défaut, verrouillée autour de son secret. En contrepoint, il revit les mois passés à Sarajevo, qui lui ont permis de se soustraire à l’emprise du passé et d’inventer sa vie. Mais peut-on réellement se libérer du fardeau familial ? Quel est, au bout du compte, le prix du non-dit ? Un roman qui mêle la grande et la petite histoire, et interroge la façon dont l’individu peut construire, en dépit des secrets de famille, son propre rapport à la vie. »
C’est étrange parce que voilà encore un roman sur un secret familial (voir mon billet précédent ; Grâce, clic). Où l’on voit à quel point un secret, des paroles non-dites peuvent avoir des répercussions terribles sur des individus. Au départ ça n’a pas été évident avec ce roman, je trouvais son écriture trop « froide », il y a une distance certaine qui s’installe avec le personnage de Joaquim, je le trouvais détaché, absent à lui même certainement. Le suicide de sa sœur a été quelque chose dont il a du mal à toucher la réalité, sans doute parce que c’est trop douloureux. Il y a le rapport avec le père aussi, qui est inexistant, en effet quand Joaquim apprend la mort de celui ci cela faisait plusieurs années qu’ils n’avaient plus de contact. La mère elle n’a pas survécu longtemps à la mort de sa fille. Joaquim lui ne dort plus qu’avec l’aide de la chimie, des années qu’il ne dort plus qu’avec la prise de somnifères. Il ne supporte pas non plus les fenêtres ou les baies vitrées qui s’ouvrent librement, il a besoin d’un garde-fou, ce n’est pas une histoire de vertige mais plutôt la peur d’un vide qui s’offrirait à lui (sa sœur s’est suicidé en se jetant du balcon de l’appartement parental), il est sujet à des tocs aussi, il a du mal avec les portes et les verrous » A quarante-quatre ans, Joaquim connaît par cœur ce cycle harassant de la vérification qui accroît l’anxiété. » (p39) et il souffre d’acouphènes. Vous avez compris que ce n’est pas facile pour lui, nous avons tous nos valises mais celles de Joaquim sont lourdes à porter.
II y a certaines lectures qui sont une évidence, vous êtes tout de suite installés, confortable et à l’aise. Pour d’autres c’est plus compliquée, j’ai déjà ressenti cela plusieurs fois. Et ce sont souvent ces lectures là qui vous laissent un plus grand souvenir. Il y a parfois des styles qui vous résistent un peu, on a mal à ressentir les mots et les lignes et puis tout à coup la magie advient et enfin le livre s’offre à vous, ne vous repousse plus et alors, c’est comme si la lumière vous était donnée, vous êtes enfin admise, intégré. Et c’est tout à fait ce que j’ai vécu avec ce roman, arrivée à la fin je n’avais qu’une envie ; le recommencer du début parce que j’avais enfin compris le langage de l’autrice.
L’autrice a, en effet, des phrases d’une beauté, d’une force, d’une vérité incroyable et l’on se dit alors ; mais oui bien sûr, c’est tout à fait cela. Et vous êtes touchés de plein fouet. Il y a des pages superbes sur le deuil, sur la guerre (j’ai particulièrement aimé les passages où Joaquim part à Sarajevo), sur les dialogues non entamés et qui rongent, sur le mystère finalement que sont nos parents et leurs vies, sur les coïncidences et les signes du destin, sur la réalité que l’on fuit.
Il y a aussi le fait que Joaquim est photographe et cela lui donne un regard accru, plus acéré sur la vie et les évènements. Sur le temps aussi. J’ai aimé cette phrase de Joaquim ; » Et tu y crois, toi, à l’amour entre des gens qui ne se photographient jamais ?! » (p54) J’ai trouvé cela assez juste et pertinent. Au final j’ai noté un nombre incalculable (ou presque ;0) de passages et ça, en général (mais je parle d’une façon personnelle) c’est très bon signe. J’espère vraiment vous avoir convaincu de lire ce livre, j’en garderais un souvenir fort et corsé.
(PS je rajouterais des extraits demain, trop fatiguée pour le faire encore ce soir)
Lu par Antigone, Noukette, Saxaoul, Jérôme, Fanny, Kathel, Alex, Karine, Sylire. Krol,
Lu pour les matchs de la rentrée littéraire Rakuten 2018 Lu pour le challenge 1 % rentrée littéraire 2018 d’Hérisson 2/6
Je n’ai pas réussi à dépasser cette distance vis à vis de Joachim et ça me désole car le roman avait tout pour me plaire. Tu en parles avec beaucoup de justesse je trouve.
C’est gentil, merci Saxaoul. ¨Pour certains autres titres ça m’a fait ça aussi, et c’est toujours frustrant c’est vrai
Une lecture forte alors ! tu me donnes envie de le découvrir, ce roman…
J’en suis ravie Sandrion, tu me diras ça
Belle écriture, je suis d’accord mais j’ai préféré Le plancher de Jeannot.
Je n’ai pas lu le plancher de Jeannot, je ne peux donc rien en dire :0)
C’est vrai ce que tu dis, ce sont les lectures qui nous ont donné le plus de mal qui restent le plus longtemps en tête. Miss Sarajevo en fait partie ❤
J’en ai fait souvent l’expérience oui. Après ces lectures là font partie de notre top de l’année ;0)
Comme Saxaoul, ce roaman avait tout pour me plaire et finalement c’est une déception. Sur le thème de la photographie j’ai préféré le Ferrari
Je suis pas sûre pour le Ferrari, j’ai tenté l’auteur avec un autre titre (dont je ne me rappelle pas, là, à l’instant) et je n’avais pas aimé.
Au fil des billets, je ne suis pas très tentée par cette lecture.
Dommage, j’aurais bien aimé être celle qui te décidera à le lire ;0)
La langue d’Ingrid Thobois est de toute beauté, je suis complètement fan…!
C’est une évidence, de toute beauté je suis d’accord ;0)
Une lecture décevante pour ma part.
ca arrive…. et ça nous arrivera probablement encore ;0)
Parfois la crainte du pathos donne un froideur au texte qui empêche de ressentir des émotions. Ce n’est pas la première fois que cela m’arrive dans les romans ou au théâtre si bien que je ne sais pas si ce livre est vraiment pour moi !
Tu veux dire la crainte du pathos de l’auteur ? Ou alors de la part du lecteur ?! C’est vrai que la froideur de certains styles m’empêchent parfois de me sentir « intégrée » dans le texte. Tente, tu verras bien ;0)
Ma collègue est bosniaque, elle a fuit son pays pendant la guerre… Je pense que je lirai ce livre, qu’elle a acheté pour notre médiathèque à sa sortie.
J’espère que tu le liras, c’est vraiment une expérience de lecture très forte.
Les avis sont partagés, s’il est à la biblio je tenterai.
Oui c’est vrai, les avis sont vraiment partagés. Je te l’ ai déjà dit mais ravie de te revoir dans la blogosphère Clara :0)
Oh j’étais passée à côté de ton billet 😉 J’ai l’impression que tu as aimé quand même ce roman au final, mais qu’il t’a un peu résisté.
Mais j’ai aimé énormément au final, j’espérais l’avoir fait comprendre dans mon billet :0) Mais c’est vrai qu’il m’a résisté au début
Oui oui j’avais bien compris 😉 Tant mieux je suis contente ❤
Ahhh, ouf ;0) Bonne journée Antigone
Tu as raison, c’est ce qui nous bouscule qui nous pousse parfois dans nos retranchements, qui nous marque durablement et j’ai très envie de lire ce roman après avoir lu ton billet.
Merci Anis, je suis ravie de t’avoir convaincue :0)
[…] impossible de ne pas vous parler de « Miss Sarajevo » d’Ingrid Thobois (le billet est par là, clic) ; « L’autrice a des phrases d’une beauté, d’une force, d’une vérité […]